Evaluation à New Vegas

A la lueur clignotante des néons dans des couloirs sans âme perdus dans les confins de la ville souterraine, au coeur de l'Underworld du fractland. Le commandant de la brigade Scarifiée ère, son oeil unique en alerte, détaillant chaque recoins d'ombres comme si il allait en surgir un aggresseur, comme si sa vie était en danger.

Son large manteau de fourrure est ouvert, laissant voir en dessous un cuir orné du drapeau US, un treillit militaire et les boots qui vont avec.

Le type est armé jusqu'aux dents. Deux pistolets à poudre de part et d'autre de sa ceinture pendent dans des holsters de fabrication post crash. Avec eux, un couteau de chasse énorme tandis que dans son dos est enfilée dans une lanière de cuir prévue à cet effet une crosse de combat à la lame aiguisée. Toutefois le plus impressionnant reste son fusil automatique tenu en bandoulière et bien au chaud sous son bras droit.

Barbu, chevelu, grisonnant, il trimbale ainsi son imposante carrure jusqu'à tomber, toujours dans cette putain de lueur des néons, au détour d'un couloir, sur le maître du mysticisme : Syn. Son oeil se plisse il l'observe avant de se décider à avancer vers lui.

Une voix rauque apostrophe le loufoque personnage en face de lui.

"C'est toi le chef du nouveau groupe arrivé en ville?"

Le ton est neutre, monotone.

"Je suis Saül, commandant de la Brigade Scarifiée et superviseur de l'A.C.T.-N.V. bonjour."

Syn revenait du bureau de Dakan, il était plutôt joyeux, le deal s'était passé au mieux, les armes et montures serait prêtes à la lune prochaine. Vegas était un véritable labyrinthe, enchevêtrement de boyaux grossièrement creusés bifurquant tout les dix mètres alternant avec des galerie tapant plus dans le gigantisme ayant jadis abrité les rames de métro. De ces monstres de métal qui fendaient l'obscurité il ne restait plus à présent que des épaves désarticulées tel des membres arrachés, ils gisaient ça et là vomissant un amas de câbles et de tuyauterie fondu. Telle la vermine, les survivants les avaient colonisé, les transformant en nid puant remplie de bouts de tissues et de cartons en lambeaux.




Mais si une choses n'avait pas changer entre les stations de métro et leur version revisité par l'apocalypse c'était bien cette foutue lumière. Blafarde, clignotante par endroit, foutu néons. Aucune douceur, aucune chaleur, rien que cette lumière glacée qui n'épargnait rien, tout devenait tranchant, aiguisé, aseptisé. Exit les nuances de couleurs, Syn évoluait dans une monde monochrome, à la limite du rêve ou plutôt du cauchemars. Mais le cauchemars ne faisait que commencer. Alors qu'il marchait de façon mécanique, regardant ses pieds comme tout bon junkie en redescante il sentit une présence. Il relève brusquement la tête et aperçois un silhouette imposante et difforme, il ne la distingue pas nettement dans le clignotement des néons. Elle semble le toiser. Un rapide coup d'œil sur sa fronde, il réprime l'envie de s'en saisir mais elle serais inutile à cette distance. Syn hésite également à continuer sa marche, il hésite pendant un seconde, révélatrice de son angoisse puis se décide à avancer. Étrangement la silhouette semble hésiter également mais finalement se découvre à la lumière.



L'œil incrédule de Syn embrasse avec horreur la vision de ce monstre à l'apparence humaine. Ce qu'il avait prit pour d'étranges excroissances sont en faite le formidable armada que l'homme trimballe: pistolets, couteau d'une taille plus que raisonnable, armes contondantes dans la plus pur tradition post-crash et enfin comble du comble un magnifique mais terrifiant fusils d'assaut d'un noir mat. La voix de l'homme rompt le silence:

"C'est toi le chef du nouveau groupe arrivé en ville?"

Cette voix ! Cette voix rauque qui semble familière. Cette, voix, cette dégaine, cette œil unique qui semble vous disséquer sans parler de l'artillerie mise en jeu. Ce gars, c'est Saül. Saül le démon, Saül le transhumaniste, Saül le boucher. Un rire nerveux s'extirpe avec difficulté de la gorge nouée de Syn, à peine audible. Et lui qui avait pensé un instant se servir de sa fronde, quelle ironie. Il est un agneau face d'un loup, mais le loup à un M16. Est-ce qu'il à peur ? Oh oui il a peur, Syn est pétrifié, la drogue et l'éclairage n'arrangeant rien il a l'impression de faire face à une apparition surnaturelle.
Merde! Le gars lui a parlé, il faut se concentrer, chaque mots comptes, s'il voit que je me chie dessus il me prendra pour un faible...et les gars comme lui n'ont pas de pitié pour les faibles. S'il je me la pète l'autre fous le prendra mal. Que nous reste t'il ? La folie. Il va lui répondre avec le brin de folie habituelle qui le caractérise. Mieux vaut se présenter comme on est, c'est plus crédible.
Tout cette cogitation s'est passée en une fraction de seconde, Syn continue à avancer, regardant Saül droit dans les yeux, sans arrogance mais sans soumission. Son éternel sourire en coin se fiche à nouveau sur son visage. Quand ils ne sont plus qu'à quelques mètres l'un de l'autre, le borgne rompt le silence pour la seconde fois, mais sa voix est maintenant plus neutre, plus protocolaire, il annonce ses titres.

"Je suis Saül, commandant de la Brigade Scarifiée et superviseur de l'A.C.T.-N.V. bonjour."

Syn incline légèrement la tête en guise de salut puis répond d'un ton assuré, légèrement décontracté...en apparence.

Syn, leader des Points Noirs, je t'avais reconnu avant que tu ne t'annonce. Ta voie est familière des ondes, Saül le transhumaniste.

Sa tête se penche sur le côté, l'oeil plissé il observe avec un air félin, d'ailleurs de l'animal il a aussi le grognement puisque c'est ce style de bruits qu'il émet pour ponctuer la présentation de son interlocuteur, signifiant par la présente qu'il a bien enregistré l'information. Syn leader des points noirs? Message reçu! Buaaarg. Il a juste entendu parler d'un nouveau groupe, guidé par un individu haut en couleur dont on lui a fait une description vestimentaire et l'envie l'a alors prise de le trouver ce type en question, Syn donc puisqu'il a un prénom. Pourquoi? Difficile à dire, sans doute là encore un besoin bestiale de contrôler "son" territoire. D'observer les nouveaux venus dans la meute, limite de leur renifler le cul pour savoir sur quel pieds danser avec eux... mais il n'y a pas que ça, non. Tout est plus complexe, toujours. Le borgne apprécie les être qui sortent de la norme. Ils sont un terrain de recrutement pour lui dans ce monde où l'âme humaine sombre souvent dans une existence tellement morne ou traumatique que le syndrome dit de perte de l'ego l'emporte sur beaucoup de gens.

Deuxième information notable, il le connait et l'a appelé transhumaniste. La remarque lui arrache un haussement de coin de lèvre, une esquisse de début de sourire quoi. Oui, transhumaniste il l'est, il est même le chantre du transhumanisme post-crash et pourtant... pourtant, il n'est lui même que si peu transhumain.

Sa chaire imparfaite n'est encore nulle part complétée de métal. Son sexe crache encore un sperme sans doute aussi infertile que celui de la plupart des habitants du Fractland. Quand à son corps, il réclame encore nourriture, eau et sommeil. Les travaux avancent, les reliques affluent, bientôt, peut-être, oui bientôt pourra t'il se transmuter mais... jusque là il est obligé de s'élever en techno-monarque imparfait, non réalisé, régnant sur une cours qui est en bonne partie plus "évoluée" que lui.

Transhumaniste il en a les idées, transhumain il ne l'est que quand ses veines accueillent temporairement des wardrugs de laboratoires militaires, boostant à la nanotechnologie ses capacités musculaires et/ou cérébrales pour un court laps de temps.

D'un revers de main mental qui ne se matérialise en rien par un mouvement de sa part, il chasse ces pensées pour enchaîner.

"Je veux t'évaluer."

Evaluer? Quel choix parfaitement robotique pour représenter le propos d'un tel adorateur des robots.

"Savoir qui tu es. Quels sont tes buts. Quel est ton avenir."

"Je veux t'évaluer."

Cette phrase résonne dans la tête de Syn. Elle est porteuse de nombreuses significations. Premièrement cette rencontre n'est pas un hasard, du moins pas complétement. Saül à forcément entendu parler de lui. Mais qu'à t-il bien pu entendre ? Ses compagnons et lui même sont restés relativement discrets depuis leur arrivés. Évaluer, ce mot à quelque chose de froid, d'aseptisé, comme la lumière qui baigne ces deux êtres d'obédience opposée. Quand on évalue on attend un résultat.
Les yeux de Syn fouille en profondeur le visage de Saül, balafré, borgne,la peaux tannée par le soleil, les lèvres gercées par le froid,les croutes aux coins des yeux, les rides plus que naissantes...un visage bien loin de la transhumanité immaculée que prône cet homme. On pourrait même y voire un coté bestiale, la manière dont son œil unique virevolte dans son orbite, il détaille tout. Ses narines semblent se dilatées, serait-il entrain de me sentir ?
Mais une seconde phrase met court aux cogitations de Syn :

"Savoir qui tu es. Quels sont tes buts. Quel est ton avenir."

Voilà donc le fin mot de l'histoire, Saül ne se la joue pas énigmatique, il veut juste savoir qui il est. Le rythme cardiaque de Syn est élevé, il espère que cela ne s'entend pas car dans sa tête c'est un véritable boucan. Il tente de se calmer, ce gars ne lui veut pas de mal, du moins pas pour l'instant. Syn décide de lui renvoyer la balle:

Pourquoi moi ? Je ne suis qu'un simple survivant et toi tu es un des dieux de ce monde...éphémère mais néanmoins divin pour le commun des mortels. Les gens te craignent à cause de ta capacité à répandre mort et destruction tout comme tu peux les en préserver. Tu me demande qui je suis, je ne le sais pas moi-même. Tu me demande mes buts,je te réponds qu'ils sont comme ceux des autres: survivre et par là même imposer mon ordre dans ce chaos. Tu me demande mon avenir, cela fait bien longtemps que l'avenir est devenue trop incertaine pour être prédit.

D'un pas il se rapproche de Syn, d'un seul pas marqué, la statut est en marche puis s'arrête à nouveau. Il écoute les propos de Syn avec une sorte d'inattention, son oeil prend même le luxe d'être clos pendant quelques secondes, comme si il s'était assoupit là, comme ça, debout, sans prêter attention à un éventuel danger que pourrait représenter son interlocuteur. Finalement il s'ouvre pour mieux dévisager à nouveau celui qui prétend n'avoir rien d'intéressant pour lui. Saül vient de se faire appeler de Dieu, or il sait bien qu'il n'y a qu'un Pancréateur. A terme bien sûr, cela pourra sera discuter car il offrira la divinité au monde, faisant autant d'égaux magnifiques au tout puissant, mais pour l'instant il y a encore tant à faire. Si c'est en Démiurge que Syn le voit, toutefois, alors tant mieux, l'information est notée et gardée bien au chaud.

"Un Dieu a besoin de prophètes et d'apôtres. Des gens à préserver de la mort. Je m’intéresse aux éveillés et bien que tu t'prétendes banals... Y a rien en toi qu'a l'air de l'être. Tu sembles en faire partie.... d'ces éveillés.

Tu dis qu'tu veux comme les autres imposer ton ordre dans le chaos?"

Sa poitrine se bombe sous le coup d'une profonde inspiration.

"Je te demande... quel est ton ordre."

Longue expiration.

Foutu timbré ! Ah il sont beaux les deux S, avec leur dogme, leur doctrine, leur ordre. Comportement changeant, vague relent de mégalomanie, complexe de supériorité, tic, toc et plus si affinité. Syn vient de définir son ordre, il achève sa tirade les yeux exorbité. Saül semble encore perdu dans ses pensées, soudain il grogne. Syn redescend sur terre et se rappelle de sa situation: Saül, New Vegas, couloir sombre, lieu isolé, fanatique, ACT, M16, Saül... L'énergumène en question s'approche une fois de plus de lui, maintenant leur visage ne sont plus qu'à une cinquantaine de cm l'un de l'autre. C'est au tour de Saül de montrer l'étendu de sa foi, l'œil exorbité ( apparemment c'est la marque de fabrique des fanatiques ), Syn ne parvient pas à définir ce qui émane de son interlocuteur, pulsions confuses assurément.

"Mon ordre est celui de l'élite. D'la constitution et du règne de l'élite. Les transhumains n'sont que les plus dignes, les plus forts, les plus brillants, les plus aptes."


Ça y est, le vioque a déballé son sac, craché sa bile. Délire suprématiste exacerbé.

"Je comprend ton ordre, c'est le même qu'le mien. "

Soulagement d'épaule à peine perceptible. Calme, décontracte, tous va bien se passer. La tension retombe, les traits de Syn se relâchent, il arbore maintenant une expression nettement plus naturelle, assez neutre avec une pointe de tristesse. Il penche légèrement la tête sur le coté et dit d'une voix posée:

Tous les chemins mènent à Rome pas vrais ? Nous suivons la même voix bien que nos moyens soient différents. Le transhumanisme...ton rêveur...il est pour moi plus un rêve qu'un but. En améliorant l'homme améliore t'on le modèle d'origine, Dieu ? Si tu arrive à ton but tu t'élèveras au dessus de Dieu lui même, corrigeant les erreur de sa création. Par là même tu changeras à jamais le concept de Dieu, tu détruiras son omniscience et son omnipotence. Il descendra de son piédestal, et rejoindra le rang des créatures imparfaites, devenue obsolète. La fin de l'histoire ?

Il se rend compte de ses divagations métaphysiques:

J'apprécierais qu'on en débatte plus en profondeur, ta rencontre ébranle mes convictions. Mais le lieu ni le moment n'est pas idéal. Je pars pour une expédition vers le Nord avec Tato de la HSC. Je serais de retour dans une vingtaines de lune à mon avis. Voilà ma fréquence.

Syn griffonne quelque chose sur un bout de papier et le tant à Saül. Maintenant: cassos ! Une petit vanne pour détendre l'atmosphère et sortir du sectaire, le ton est plus enjoué.

J'ai rendez avec une certaine Emi, je l'ais déjà bien trop fait attendre. Cela va faire un an que j'ai pas vu de visage féminin, ça serais bête de louper ce rencard.


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